
La Mauritanie a été officiellement désignée, vendredi soir, à l’issue de la 14ᵉ session de la Conférence des Parties à la Convention d’Abidjan, pour présider cette instance régionale clé durant trois ans. Cet événement, organisé au Palais des Congrès de Nouakchott, marque un tournant dans la mobilisation ouest-africaine pour la sauvegarde des écosystèmes marins et côtiers, menacés par les changements climatiques et la pression anthropique.
Un mandat axé sur l’action et la coopération
En assumant la présidence de la Convention, la Mauritanie s’engage à impulser une dynamique renouvelée pour la protection du littoral, dans un contexte où près de 65 % des côtes ouest-africaines subissent une érosion accélérée. La ministre de l’Environnement et du Développement durable, Mme Messouda Mint Baham Mohamed Laghdhaf, a insisté sur l’urgence d’agir : « Ce mandat est un honneur, mais aussi une responsabilité. Nous devons transformer les engagements en résultats concrets pour nos populations et nos écosystèmes. »
Les travaux de la COP14 ont abouti à l’adoption de la Déclaration de Nouakchott, présentée comme un « nouveau départ » pour opérationnaliser la Convention d’Abidjan. Ce texte appelle à une meilleure intégration des données scientifiques, notamment via le septième rapport du GIEC (à paraître en 2025), qui devra inclure des scénarios climatiques détaillés à l’horizon 2050 pour les zones marines.
Harmonisation et financements : les clés du succès
Parmi les priorités figurent la ratification des protocoles additionnels à la Convention et l’harmonisation des politiques avec d’autres cadres internationaux, tels que les conventions sur le climat (CCNUCC), la biodiversité (CDB) ou les zones humides (Ramsar). « La fragmentation des efforts est notre ennemi. Seule une approche coordonnée permettra de lutter contre la pollution, l’érosion côtière ou la perte de biodiversité », a souligné M. Mamadou Kane, Secrétaire exécutif de la Convention.
Le plan d’action 2025-2027, approuvé lors de la session, servira de feuille de route pour mobiliser des financements et mettre en œuvre des projets concrets, comme la restauration des mangroves dans le delta du fleuve Sénégal. Les participants ont également plaidé pour un soutien accru des partenaires techniques et financiers, notamment l’ONU, afin de combler le déficit de ressources estimé à plusieurs milliards de dollars pour la région.
Sensibilisation et innovations locales à l’honneur
En marge des négociations, une exposition environnementale a mis en lumière des initiatives locales, comme l’utilisation de drones pour surveiller l’érosion ou des programmes communautaires de replantation de palétuviers. La ministre Laghdhaf et les délégations ont salué ces efforts, soulignant le rôle crucial des savoirs traditionnels et des technologies innovantes.
« Ces projets montrent que les solutions existent, mais elles doivent être amplifiées », a déclaré un expert sénégalais présent sur place, rappelant que les mangroves, en plus de protéger les côtes, stockent jusqu’à quatre fois plus de CO₂ que les forêts tropicales.
Vers une diplomatie environnementale renforcée
La 14ᵉ session de la Conférence des Parties à la Convention d’Abidjan s’inscrit dans une séquence internationale dense pour la Mauritanie, qui coïncide avec des forums majeurs à Nice, Abu Dhabi et Nairobi. Pour Nouakchott, cette présidence est l’occasion de positionner le pays comme un acteur pivot de la résilience climatique en Afrique de l’Ouest.
« Le temps des discours est révolu. Avec la Déclaration de Nouakchott et notre plan d’action, nous avons les outils pour agir. Reste à traduire l’ambition en réalité », a conclu M. Kane, lors d’une conférence de presse finale aux côtés de la ministre.
Alors que la Mauritanie endosse ce rôle de leader, la question des moyens et de la coopération transfrontalière restera centrale. Dans une région où les défis climatiques ignorent les frontières, l’espoir réside désormais dans une solidarité régionale renouvelée – et des actes à la hauteur des urgences écologiques.