
Lors d'un entretien accordé au journal Asharq Al-Awsat à Riyad, le Président de la République, M. Mohamed Cheikh El Ghazouani, a livré une analyse approfondie des grands enjeux régionaux et internationaux, de la position mauritanienne sur le plan de paix américain pour Gaza aux défis sécuritaires dans le Sahel.
Gaza : un soutien conditionné au plan Trump et une réaffirmation de la solution à deux États
Sur la question palestinienne, le Président El Ghazouani a exprimé son appréciation pour le plan de paix du Président américain Donald Trump, le qualifiant de « développement positif appréciable » visant à un cessez-le-feu. Cependant, il en a conditionné le succès à un impératif majeur : « le respect des clauses de l’accord ».
« Le succès restera tributaire de la disponibilité d’une volonté sincère qui donne la priorité à la dimension humanitaire », a-t-il précisé. Surtout, le chef de l'État mauritanien a insisté sur l'absence d'alternative à la solution à deux États, seule à même de permettre aux Palestiniens d'exercer leur droit à un État indépendant et de consolider la stabilité et la sécurité dans toute la région, conformément aux résolutions internationales et à l'initiative arabe.
Des relations fraternelles et un partenariat renforcé avec l'Arabie Saoudite
Le Président a profité de sa participation à l'Initiative pour l'Investissement Futur (FII) à Riyad pour saluer les « liens de fraternité et d’amitié anciens » unissant la Mauritanie et l'Arabie Saoudite. Il a mis en avant la convergence de leurs visions sur les questions régionales et internationales, reflet d'une « confiance mutuelle » et d'un « partenariat constructif » en pleine croissance.
Des domaines de coopération comme l'industrie, les infrastructures, la numérisation et l'énergie ont été cités comme autant d'opportunités à saisir. Le Président a également présenté la FII comme une plateforme idéale pour promouvoir la Mauritanie en tant que « destination d’investissement prometteuse ».
Migration : un recensement des illégaux, pas une expulsion de migrants
Répondant aux critiques concernant la politique migratoire de son pays, le Président El Ghazouani a fermement rejeté les « accusations malveillantes » et les « déformations » relayées par certains médias sociaux. Il a expliqué que face à un afflux croissant de migrants illégaux utilisant la Mauritanie comme zone de transit ou de résidence, menaçant ainsi la stabilité du pays, l'État avait décidé d'un recensement complet des étrangers.
L'objectif annoncé est de renvoyer les personnes en situation irrégulière dans leurs pays d'origine, en coordination avec leurs gouvernements et dans des conditions préservant leur dignité, afin qu'elles puissent remplir les conditions d'un séjour légal. Il a rappelé que la Mauritanie accueillait déjà près de 340 000 réfugiés maliens et des dizaines de milliers d'autres personnes bénéficiant d'un séjour légal, affirmant que le pays était « un refuge sûr pour les réfugiés ».
Jeunesse, développement et lutte contre la corruption : les priorités nationales
Concernant l'émigration des jeunes Mauritaniens, M. El Ghazouani a reconnu un défi mondial, mais a détaillé les efforts nationaux pour y faire face : réforme du système éducatif, promotion de la formation professionnelle, lancement de projets d'emploi et diversification de l'économie. Il a assuré que le gouvernement renforçait le rôle des jeunes dans la gestion des affaires publiques et avait pris des mesures stratégiques pour lutter contre la pauvreté et la marginalisation.
Sur un autre front, la lutte contre la corruption a été érigée en « priorité absolue », décrite comme une « menace stratégique pour l’État moderne ». Le Président a cité la création d'une autorité indépendante, l'activation des organes de contrôle et une transparence accrue comme preuves de cet engagement national et moral.
Sécurité régionale : la Libye, un axe fondamental de stabilité
Évoquant la situation en Libye, le Président El Ghazouani a démenti que le dernier sommet des pays du Sahel ait contenu des menaces, mais plutôt une affirmation de la nécessité de résoudre une crise qui est « un axe fondamental dans l’équation de la stabilité » régionale. « L’instabilité en Libye signifie la poursuite de l’instabilité dans toute la région », a-t-il averti, plaidant pour une solution rapide menée par les Libyens eux-mêmes, à l'abri des interventions étrangères qui prolongent le conflit.
Enfin, concernant la lutte contre le terrorisme dans le Sahel, il a reconnu que le groupe des cinq pays du Sahel n'existait plus, mais a affirmé que l'esprit de son plan d'action multidimensionnel – combinant sécurité, développement et dimensions idéologique et sociale – demeurait. Face à un terrorisme qui mute, il a appelé à une coordination collective, soulignant que « la région n’a d’espoir de victoire décisive et durable sur la violence et le terrorisme que collectivement ». Pour prévenir de nouveaux coups d'État, le Président El Ghazouani a conclu que « la stabilité sécuritaire et politique, et l’accent mis sur la dimension du développement, constituent la plus forte immunité ».

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